VISION D’ARCHITECTURE D’ALAIN SARFATI
Pour Alain SARFATI, l'architecture est un art majeur. C’est un langage universel qui s’adresse à tous, un engagement dans l’histoire. Pour lui, il ne faudrait pas que ce soit l’informatique, plus que l’architecte lui-même, qui pilote l’architecture.
L’ivresse d’un « jamais vu » (toujours plus haut, plus remarquable) et la recherche systématique de formes atypiques font que l'architecture contemporaine a atteint un niveau paroxystique. On ne parle plus qu’en termes de performances techniques, de records, eux-mêmes très vite dépassés. Et tout finit par se ressembler, ou presque. Là où nous pouvions attendre de la diversité, nous nous acheminons vers de l’uniformité.
La diversité du monde et des hommes est, selon Alain SARFATI, notre bien le plus précieux. La diversité est une source de plaisir à explorer, à interroger, à découvrir.
Son architecture est une architecture qui travaille sur ses limites, avec ses limites. Et la question du sens se pose aujourd’hui de façon encore plus aigue.
Pour Alain SARFATI, la spécificité culturelle de chaque lieu constitue le fondement de la démarche bioclimatique. L’architecture bioclimatique est là pour redonner du sens aux limites parce que l’architecture a des sources multiples. La démarche bioclimatique est une manière de rentrer dans une culture, pour aller vers une autre architecture, celle qu’il développe et qu’il ne cesse de promouvoir, celle qui tourne le dos à une architecture faite uniquement de rupture radicale. Il résiste à cette domination de l'image, à l'idée qu'une image suffirait pour tout dire de l'architecture : des images qui séduisent très vite et qui font rentrer l’architecture dans le champ de l’éphémère et du jetable. Pour lui, il s’agit d’un piège, d'une architecture qui résulterait de la création ex nihilo, d’une « créativité » qui viendrait de nulle part.
Tout projet architectural doit être nourri de culture, de nature.
Alain SARFATI propose de faire vivre la diversité, celle que la nature nous a donnée en partage et de faire de l'architecture non plus un « simple emballage » mais d’y mettre de la vie, de renforcer l’expression d’un nouveau rapport à la nature sous des formes métaphoriques. Avoir une démarche bioclimatique qui soit technique, énergétique, mais pas uniquement, qu’elle soit aussi poétique.
Pour lui, bien plus que l’outil, c’est le sens même d’une démarche attentive qui nourrit véritablement la création. Le béton, l’acier, le verre, l'informatique ne sont que des outils, les matériaux d'un projet, pas une fin en soi. L’architecture doit être en chaque lieu différente, toujours en accord avec son environnement, avec ses énergies. L’architecture doit rester ambassadrice, elle contient du lieu, elle contient de l’autre.
Il souhaite que l'architecture redevienne un langage qui fasse sens pour tous.
L’architecture d’aujourd’hui, aveuglée par la technique et la vitesse, a perdu de vue le rapport direct avec l’homme et la nature.
Alain SARFATI a toujours voulu que son architecture soit métaphorique et atmosphérique, poétique, pleine de villes, de vie et de nature, qu’elle commence par un rêve. Tout peut commencer par un dessin, même si, ensuite, l’informatique et le numérique vont concrétiser une forme.
Pour lui, la grandeur de l’architecture est dans sa capacité à émouvoir, à raconter une histoire, à proposer un avenir.
Dans chaque projet, l’architecte s’appuie sur toutes les techniques disponibles mais ne sacrifie jamais à l’usage ou à une forme par trop périssable. Dans chaque réalisation, il cherche toujours le plaisir de celui qui va investir les lieux.
SON REGARD SUR L’ARCHITECTURE SE CONCRETISE AU TRAVERS DE SES REALISATIONS
L’AMBASSADE DE FRANCE à Pékin
Sens, Culture et Identité
Comme l’écrit le journaliste Serge Gleizes (The Good Life) « L’ambassade de France à Pékin représente parfaitement la France, grâce à un savant mélange de rigueur et de fantaisie, de classicisme et de modernité, grâce enfin à quelque chose de subliminal, une manière de se dévoiler à postériori. Bilan : c’est une prouesse technique et environnementale, humaine et poétique, en phase avec l’attention que porte l’architecte français à l’humain, à la nature, aux saisons et à la vie».
Comprenant la chancellerie, les services, le consulat et la résidence, le bâtiment de la nouvelle ambassade est une création à part entière. C’est un monolithe de verre et de béton, de 20 000 mètres carrés avec, au centre, un jardin intérieur qui rompt avec la minéralité ambiante.
Il fallait prendre en compte le soleil, le vent, le sable, la poussière… mais aussi l’imprévisible, la localisation du bâtiment dans une zone sujette aux séismes. La réponse d’Alain SARFATI a bien sûr été fonctionnelle mais, au delà, elle a été culturelle et bioclimatique. Elle a été l'occasion d'une réflexion à la fois sur l'espace, sur le contraste entre la partie administrative et la partie réception, sur la place de la nature, la fluidité des circulations, sur l'opposition entre l'intérieur et extérieur, sur la surprise, le plaisir…
LA SALLE PLURIFONCTIONNELLE « LE SCARABEE » à Roanne
Métaphores
Projet inhabituel : il fallait imaginer un centre polymorphe, localisé au coeur de nulle part, en pleine nature, sans le moindre élément auquel se raccrocher, imaginer un nouvel équipement événementiel, un espace entièrement modulable, capable de recevoir plus de 5 500 personnes, dans des contextes complètement différents : concerts, salons, spectacles, expositions et autres congrès.
Un vrai pari pour un bâtiment dans lequel presque tout, devait être mobile.
Alain SARFATI a dessiné des vagues ondulantes dans le ciel, des plis. Le plissé, métaphore de l’histoire industrielle de Roanne, dont la renommée s'était faite sur le textile. Pour le Maire, l’image paraissait trop belle, il a demandé à l’architecte s’il « saurait construire ce qu’il avait dessiné ».
Aujourd’hui le site internet de Roanne vante « Le « Scarabée », un espace original, unique et remarquable par son architecture, ses couleurs, ses escaliers ».
Alain SARFATI n’a pas négligé pour autant les prouesses technologiques. L'originalité de ce projet s’est aussi trouvée dans la recherche du confort thermique et acoustique, une nouvelle manière d’aborder la Haute Qualité Environnementale (HQE). La structure en béton garantit une isolation phonique (Charles Aznavour a trouvé que la salle avait une acoustique remarquable, qu’il n’avait trouvée nulle part ailleurs).
Ce plissé laqué or, aux nuances changeantes au gré de la lumière, l’architecte l’a voulu spectaculaire. C’était sa vocation. Le « Scarabée » a non seulement engendré une nouvelle visibilité sur les activités régionales mais, devenu attracteur, il a engendré une nouvelle économie dans une région qui était surtout reconnue pour son cadre de vie et sa gastronomie.
Gastronomie justement, Michel Troisgros, Chef réputé 3 étoiles au guide Michelin, s’est lui aussi emballé pour le site : « Je fais de la cuisine comme Alain Sarfati fait son architecture, pour donner du plaisir »
L’architecture ne peut rester froide et sans émotion.
MELUN SENART
La ville et ses vitesses
Lauréat du Concours international pour l’aménagement de l'espace central de Melun-Sénart, Alain Sarfati a beaucoup réfléchi au couple espace public/vitesse. Sa reflexion l’a conduit à envisager la nature dans la ville comme la dimension compensatoire de la vitesse. Cette recherche originale permet de proposer des solutions appropriées aux diverses situations urbaines qui sont bien souvent paradoxales, voire contradictoires. Par ailleurs, plutôt que de se laisser attirer par les sirènes de l’utopie, il a préféré définir huit « Topiques » autour desquels il construit sa démarche et ses réalisations. Sans hiérarchie de l'un sur l'autre, chaque topique répond à une seule et même question : Comment ne pas faire dépendre l'architecture de la seule technique ? Ses topiques : la ville, la vitesse, la nature, l’orientation, le paysage, la démarche, le temps, et le style, toujours présents dans son travail.
Concernant la vitesse, plus on organise la fluidité du trafic automobile, plus on consomme de l'espace. Le paradoxe de la RN7 est que « pour consommer vite, il faut circuler lentement ». De même, les effets de la vitesse sur la ville se ressentent aussi lorsqu'une voie routière se transforme en rue piétonne. On assiste alors à une mutation profonde du commerce, avec l'implantation d'enseignes de restauration rapide, de magasins à bas prix, etc. La vitesse a donc des effets sur la nature-même des programmes. Plus la vitesse des déplacements augmente, plus on recherche de la lenteur, celle qu’apporte la nature, comme dimension compensatoire. La vitesse doit donc faire l’objet d’un choix et d’une réflexion spécifique en fonction des types de programmes souhaités. Le « paradoxe des tours de La Défense, c’est que l’on ne peut pas avoir dans un même lieu de la vitesse horizontale et de la vitesse verticale ». La ville dense se dessine dans cette perspective. Le rêve d’une ville européenne, d’une ville moderne, sait mettre en rapport la ville, ses vitesses, et la nature.
Le QUARTIER DU BEL AIR, à Saint-Germain-en-Laye
Diversité
Alain SARFATI a construit un grand nombre de logements mais toujours dans la diversité. Là, il s’agissait de la réalisation de tout un quartier, avec son ensemble commercial, ses écoles, son jardin. Encore un exercice sur la diversité : diversité des maîtrises d’ouvrage, des architectures, diversité des façades.
Si l’ensemble du projet présente une densité de plus de 150 logements à l’hectare, chaque immeuble a fait l’étude d’une orientation spécifique qui permet que tout logement soit ouvert, aéré et sécurisé.
Le MUSEE DE L’ESPACE à Shanghai
Métaphores
Pour Alain SARFATI, tout projet est une histoire, une vision de la société, de la nature et parfois même de l’univers. Pour Shanghai, concevoir un Musée de l’espace du futur, c’est montrer à quel point la vision du monde et de l’architecture ont changé. On ne peut plus utiliser uniquement un télescope pour signifier l’espace ou une soucoupe volante pour représenter l’univers ! Son immensité et les nouvelles technologies bouleversent chaque jour nos connaissances sur l’espace.
Pour donner naissance à un projet à la fois rationnel et poétique, il a imaginé l’histoire d’une rencontre entre un satellite et une météorite : percussion, compression, déploiement, contrastes entre l’extérieur et l’intérieur… d’où une forme complexe et originale.
Le THEATRE NATIONAL DE TOULOUSE
Diversité / Urbanité
Le projet était complexe : construire un théâtre qui donne sur quatre rues différentes, qu’il soit visible sans être monumental. Le Maire voulait : « Un bâtiment moderne mais en briques ». Il fallait aussi garder la porte ainsi que la façade nord de l’ancien conservatoire, toutes deux classées à l’inventaire des Monuments Historiques, et ne pas toucher aux fragments de ruines datant de l’époque romaine.
Le projet d’Alain SARFATI n’a pas visé la rupture, mais une modernité respectueuse du contexte, par le choix des formes, des matériaux, par la différenciation des façades. Il a imaginé un théâtre aux multiples facettes, chaque façade s’articulant avec son voisinage direct. La brique, omniprésente, inscrit le bâtiment dans une culture millénaire et le relie à l'ensemble de la ville rose comme s’il avait toujours été là.
L’architecte a voulu que ce site soit théâtral, il a fait en sorte que la diversité soit omniprésente, déroutante. Il a voulu marquer une différence entre le dehors et le dedans, l’extérieur et l’intérieur, que l’on pénètre dans un autre monde, dans un autre univers, le temps d’une représentation. Dès que la porte d’entrée, le grand hall étincelant invite au spectacle, avant l’immersion dans la grande salle bleue.
L’idée de l’architecte a été de concevoir une véritable « Cité du théâtre » avec, en plus de la grande salle, une salle modulable de 250 places, un studio, une salle de répétition, divers ateliers et de grandes passerelles pour articuler l’ensemble de ces lieux. Tout est décor, tout est miroitements et reflets pour provoquer la surprise, l’émotion, l’étonnement.
L’UNIVERSITE DE DROIT / PANTHEON-ASSAS à Paris
Appropriation
L’université Panthéon/Assas, en plein coeur de Paris, est l’une des treize universités parisiennes. A l’origine elle devait être fermée pour réhabilitation mais le projet s’est transformé en une mutation / rénovation / agrandissement, urgente et impérative, face à de nombreux problèmes qui ont surgi. Au final, le chantier s’est déroulé avec les contraintes d'un site occupé.
Soucieux de faire de cet endroit un lieu de convivialité, Alain SARFATI a imaginé une architecture métaphorique. Pour changer l’aspect un peu austère qui était donné de l’extérieur, il a imaginé un escalier en « chambord » devenu une vitrine éclatante, emblème, surtout le soir venu, quand l’éclairage révèle son existence. L’escalier, nouvelle articulation urbaine, répond également à une nécessité sécuritaire.
A l’intérieur, le projet est à la fois architectural, technique et numérique. En complicité avec l’ingénieur informatique, l’architecte a mis l’accent sur tout ce qui pouvait permettre l'appropriation de ce lieu, l’envie d’y travailler pour un étudiant du 21ème siècle.
Le grand hall, sorte de hall de gare à l’origine, est devenu une artère principale d’où se répartissent la mezzanine, la cour d’honneur, l’amphithéâtre, les salles de TD, de nombreux coins de lecture, la bibliothèque, le Learning Center… De monumentale et froide, l’université est devenue conviviale et vivante avec de nombreux écrans qui facilitent la communication et un système informatique qui permet de connaître à l’instante les interventions, l’heure des cours, les plannings ou simplement de réserver des salles…
Les conditions de vie et de travail ont été complètement changées par une extension des locaux et la réalisation de nombreux espaces confidentiels et conviviaux où les étudiants, ont l’air d’être chez eux, confortablement installés, dans une atmosphère nourrie de métaphores et pleine de vie.
COULEUR CHAMPAGNE
Alain SARFATI croit dans la richesse que nous offrent nos cultures comme support de création. Savoir d’où l’on part pour conduire un projet et ne pas être uniquement porté par la fascination de la technologie. La diversité architecturale est à défendre tout comme on défend la biodiversité. Il a toujours voulu que son architecture soit « attentive », gaie, tournée vers la vie, pétillante comme le champagne, comme la couleur champagne. D’où cette touche d’or qu’il aime à mettre dans chacune de ses réalisations pour qu’au delà de la technologie, il y ait également une dimension poétique et métaphorique.
Fil conducteur de ses réalisations, la « couleur champagne » a toujours été une constante qui s’impose, tout comme le soleil scintillant qui illumine.
Sous ses voiles dorées, l’Ambassade de France à Pékin, dénote une certaine liberté, le Scarabée de Roanne abrite la vie culturelle sous un plissé d'or, tel un rideau de scène, tous ses immeubles s’ornent de drapés dorés. La robe couleur champagne est partout comme une parure, une signature, elle est devenue une marque, un style.
Le champagne n’évoque pas, pour Alain SARFATI, le point final d’une oeuvre achevée mais plutôt l’euphorie d’un plaisir et d’une émotion partagés avec ceux qui vont vivre dans les lieux qu’il a créés. Il a toujours voulu que son architecture pétille comme le champagne et il trouve une grande similitude entre les deux : tout comme on passe de la terre à la construction, de la maquette à la réalisation, de la vigne à la dégustation, il faut sans cesse composer, assembler, orienter, délimiter, équilibrer, ajuster… tout en suivant la course du soleil, dans un accord bioclimatique avec la terre